ZENDO "La Rivière Blanche"

La lettre (novembre 2025)

 

Ô Ami-e sur la Voie

 

A l’heure du premier zazen, la nuit enveloppe encore le zendo et par la fenêtre, à la lueur du réverbère je vois quelques feuilles qui volent en tombant des hauts platanes qui entourent la maison. Tout est calme et en ordre, la bougie sur la petite table éclaire l’espace de la pratique, la fumée de l’encens embaume ce lieu par la douceur de son parfum. Un son apparait, celui du gong, puis disparait. Le silence emplit l’espace vide …

Un moine demande à Maitre Unmon, quel est le sens à donner au dépouillement des arbres, ce dernier répond simplement par Tairo kinpû !

Une question, une réponse ! Quoi de plus naturel en cette saison que l’on nomme automne, quoi de plus naturel que des feuilles qui tombent et des arbres qui se dépouillent. Toutefois, la question ne manque pas de profondeur puisqu’elle pointe directement l’énigme de la naissance et de la mort. Pratiquer zazen, c’est résoudre cette question de la naissance et de la mort, nous rappellent les anciens patriarches. Hirano Roshi lors d’un de ces derniers enseignements au Centre Dürckheim nous a livré quelques indications précieuses. Il rappelle que ces mots de Tairo kinpû sont composés de quatre idéogrammes condensant une valeur profonde du sens de la vie. Tairo : signifie le dévoilement (ro) de la totalité, le révèlement du corps (Tai) originel, cela signifie la manifestation de la nature, de l’univers. Concernant le terme de kinpû il signifie le vent doré, qui n’est autre que le vent d’automne. Belle réponse de Maitre Unmon !

Ami-e sur la voie, assieds-toi simplement, pratique zazen, renouvelle ce geste tout au long de ta vie, qui le temps venu ouvre à ce dépouillement qui n’est pas seulement triste et mélancolique, mais éveille à une autre lumière qui rayonne dans tout ce que tu vois au quotidien. Ce dépouillement et cette ouverture au corps originel, à notre vraie nature dirait J. Castermane, se présente plutôt comme stimulant et ressourçant. Ce détachement progressif de tes illusions, de tes réactions physiques, émotionnelles et mentales, te plonge dans un calme et une sérénité que tu peux goûter de manière plus ou moins continue. Lentement, tu t’éveilles à ta vraie nature, c’est le sens même de qui tu es, quel que soit le chemin que tu prennes. Le vent doré, le vent d’automne ; inhale ce vent, ce souffle, ouvre-toi totalement à ce qui te traverse afin de connaitre la vie lumineuse, ce vent doré.

Zazen, dit Hirano Roshi, c’est se dépouiller comme l’arbre, c’est par là que l’on trouve la voie de la grande félicité, la voie de Tairo kinpû.

Ami-e sur la voie, ouvre-toi au soi réalisant le soi, instant après instant, la voie de Tairo kinpû, le passage d’une saison à l’autre qui se fait silencieusement, sans même que tu t’en rendes compte, puis subitement Cela apparait clair et limpide.

Du bourgeon à la feuille, des couleurs : vert, rouge, jaune, roux et brun, les saisons se déploient en un flux continu, nous sommes ces saisons et zazen nous y met en contact de manière toujours plus subtile. La nuit est tombée, c’est l’heure du dernier zazen, le vent souffle dans les branches, emportant les dernières feuilles, le réverbère éclaire la rue devant le zendo et le silence résonne de sa douce profondeur.

 

 

 

Cercle zendo

Comme la lune illumine la nature

Ainsi elle éclaire mon coeur

 

Date de dernière mise à jour : 26/10/2025